A malin, malin et demi : Le Limier de Mankiewicz

Bon j'avoue... J'ai un peu honte de vous le dire mais je pars en vacances la semaine prochaine... Je sais que ça ne se fait pas de partir en vacances en plein mois d'août... Mais que voulez-vous je suis un rebelle et rien ni personne ne me changera... Bref, ce que je voulais dire, c'est que je vous propose d'avancer ma chronique sur les chef-d'oeuvres du Septième art pour cause de vacances prolongées...

Aujourd'hui l'heureux élu n'est autre que le dernier film de Joseph L. Mankiewicz : le Limier.

A première vue, on dirait un titre de film policier. Mais plus que ça, le Limier est avant tout un film sur le jeu. Vous aimez le jeu? Alors ce film est fait pour vous. Tout au long du film, le réalisateur développe les thématiques suivantes: Qui joue avec qui? Qui est le jouet de l'autre? Jusqu'où peut-on aller par jeu? La vie ne se résume-t-elle qu'à un jeu? Peut-on jouer éternellement au même jeu? Y-a-t-il vraiment un vainqueur dans tout jeu? Peut-on s'arrêter à temps de jouer? A vous de jouer... Voici l'histoire :

Sir Andrew Wyke, un auteur de romans policiers richissime, invite dans sa vaste demeure Milo Tindle, un coiffeur londonien d'origine modeste, qui n'est autre que l'amant de sa femme. Wyke, désireux de voir partir sa femme et surtout de ne pas la voir revenir, propose un arrangement à Tindle : une simulation de cambriolage de la propriété dans le but de toucher l'argent de l'assurance. Tindle, impressionné par ce stratagème, accepte. Mais c'est sans compter sur le goût du jeu d'Andrew Wyke et son mépris pour ce fils d'émigré italien...

Malheureusement, je ne peux pas tout vous raconter, il faut d'abord voir le film. Il dure deux heures et demie. Mais grâce à l'incroyable fluidité de la réalisation et aux multiples rebondissements scénaristiques, il n'y a aucune chance que vous vous endormiez devant... Dernier film de Mankiewicz, daté de 1972, cette oeuvre est marquante non seulement par sa mise en scène mais aussi indéniablement par le jeu de ses acteurs principaux. D'ailleurs, fait unique dans l'histoire du cinéma américain, tous les acteurs du film ont été nominés aux oscars. Ce qui fit dire à Mankiewicz qu'il reprendrait le cinéma que le jour où un réalisateur aurait fait aussi bien que lui... Il mourut en 1993 sans avoir retouché une caméra durant ses vingt dernières années...

Mais revenons aux acteurs. Et là -ne m'en voulez pas- je ne peux vous parler que des deux acteurs de la première partie du film sous peine d'éventrer les secrets scénaristiques de l'oeuvre ici présente. Dans cette première partie, nous assistons à un duel générationnel - car il s'agit bien d'un duel de jeu d'acteur- entre Sir Laurence Olivier, qui interprète Andrew Wyke, et d'un Michael Caine se glissant sous la peau du séducteur Milo Tindle.

Sir Laurence Olivier

En effet, Sir Laurence Olivier, né en Angleterre en 1907, est l'acteur shakespearien par excellence. En plus de ses multiples interprétations théâtrales, Laurence Olivier se lance dans la réalisation de trois des classiques du plus connu des auteurs anglais: Henry V, Hamlet et Richard III. Evidemment, il se donne le rôle principal à chaque fois mais comme chacun sait, on n'est jamais mieux servi que par soi-même... Avec Hamlet, il obtient les oscars du meilleur film et du meilleur acteur en 1948. Devant un tel succès, la reine Elisabeth ne peut que l'anoblir, ce qu'elle fera en 1960. Manifestement plus attiré par le théâtre, il n'accepte de jouer dans un film si le jeu en vaut la chandelle et là avec le Limier et le personnage d'Andrew Wyke, il tient un rôle à sa mesure. Il disparu en 1989. Mais avant, il laissera des propos acerbes sur les comédiens de la nouvelle génération : "A mon époque les acteurs rêvaient d’être stars. Aujourd’hui les stars rêvent d’être acteurs."

Michael Caine

Je pense que cette critique ne s'adressait pas à Michael Caine... Certes, il s'est compromis dans Terrain Miné de Steven Seagal sans oublier Miss Detective avec Sabdra Bullock... Mais bon, il remonte la pente avec Batman Begins. C'est quand même un super acteur!!! Né en 1933 et issu d'une famille pauvre du sud de l'Angleterre, Michael Caine (Maurice Micklewhite de son vrai nom) n'a pas eu la chance d'écumer les théâtres londoniens dans sa jeunesse comme Laurence Olivier mais malheureusement pour lui plutôt les champs de bataille coréens... De retour, il cumule les petits jobs tout en jouant le soir dans les théâtres régionaux mais aussi pour la télé. Bien lui en a pris puisqu'il est rapidement repéré au milieu des années 50. Mais ce n'est qu'au milieu des années 60 qu'il accède à ses premiers rôles marquants dans : Zoulou, Ipcress et Alfie (l'original pas le remake avec le tout pourri Jude Law), puis dans les années 70 dans Le Limier et l'Homme qui voulut être roi (que je recommande fortement) puis la consécration (avec oscar en prime) avec Hannah et ses soeurs de Woody Allen en 1987. Même si ses choix actuels sont quelques peu discutables, il demeure dans le panthéon des grands acteurs.

Mais revenons au film. Qu'en sort-il de ce duel? Et bien un grand moment de cinéma évidemment aidé par un scénario à l'intrigue et aux dialogues ciselés par Anthony Schaffer. On sent les acteurs plus intéressés par la qualité du film qu'à leur propre ego. Ils sont vraiment aux services du film et du réalisateur. Mais bon même si je n'ai parlé que de ces acteurs, il ne faut pas oublier les autres qui ont une importance capitale dans la suite du film. Vous comprendrez quand vous aurez-vous le film.

Sinon, mis à part que la pièce de théâtre dont est extraite le film a refait son apparition en France avec Weber et Bruel dans les rôles principaux, on murmure la possibilité d'un remake avec Jude Law (oh c'est pas vrai!!!) dans le rôle de Tindle et plus intéressant cette fois-ci Michael Caine himself dans le rôle cette fois-ci d'Andrew Wyke. Le tout réalisé par Stephen Frears. A suivre donc...

Je vous laisse et bon film - que dis-je- bon jeu et qui sait, peut-être que cette chronique n'était qu'un jeu?